Les bons choix de Marc – Octobre 2016

Des pigeons, et deux colombes
par Marc Chapleau

Marc Chapleau

Marc Chapleau

Le documentaire s’intitule Les raisins amers (Sour Grapes) et il raconte la rocambolesque histoire de Rudy Kurniawan, jeune escroc indonésien et as de la contrefaçon, qui a réussi à faire écouler pour environ 100 millions de dollars de faux vin.

De ronflantes bouteilles trafiquées, des Romanée-Conti, des Latour, des Lafite-Rotshchild et cie. Toutes ensuite achetées par d’avides collectionneurs, des millionnaires souvent, et notamment par un producteur d’Hollywood aux joues couperosées qui s’expose à la caméra, son scotch à la main. Grosse misère…

« Sur une bouteille prétendument de 1858, on a trouvé de la colle Elmer’s… alors que la Elmer’s Glue n’est apparue sur le marché qu’à la fin des années 1940… », explique Bill Koch, un milliardaire qui, poches très profondes aidant, a l’air un peu moins catastrophé que bien d’autres gars qui se sont fait joyeusement berner par Kurniawan.

Perso, et là c’est mon côté prolo qui parle, j’ai trouvé ça finalement assez réjouissant de voir de gros bonnets pleins aux as, avides et cupides, se faire rouler dans la farine. Des buveurs d’étiquettes souvent, qui goûtaient ainsi, en quelque sorte, à leur propre médecine…

Ce qu’on retient également de l’histoire, c’est que si l’arnaqueur Kurniawan n’avait pas été soi-disant collectionneur de vin et grand amateur, bien peu de gens, et surtout pas des pontes du cinéma hollywoodien, se seraient intéressés et encore moins laissé charmer par cet Indonésien à lunettes au look tout ce qu’il y a de plus ordinaire.

Mais voilà, le vin, on l’a dit et redit, est un puissant excitant, un psychotrope, même. On perd facilement la boule pour lui.

David Pelletier

Il sera passé tel une comète, une étoile filante, le temps de briller, éperdument, sur les médias sociaux. David Pelletier, auteur du blogue Le Sommelier fou (même s’il n’était pas du tout sommelier), est mort subitement la semaine dernière en Californie, alors qu’il effectuait une tournée des vignobles. Son départ soudain, à 40 et quelques années, rappelle celui, voilà une décennie, de Stéphane Émond, autre chroniqueur en vin, à l’époque en gros du même âge que David Pelletier.

On a envoyé à ce dernier sur Facebook cette semaine tout plein de « RIP, l’ami Pelletier » et de « Pense à nous là-haut ! ». Mais mon petit doigt me dit que le bougre, qui se disait agnostique, se terre probablement plutôt en Scandinavie…

Le rapport ? Eh bien, c’est que Pelletier — l’an dernier, de mémoire — s’était fait admonester par un autre blogueur qui, lassé de se faire asticoter et de polémiquer, lui avait lancé un mémorable : « Monsieur, vous êtes un troll ! » avant de le barrer de son compte Twitter.

Or c’est vrai. Le Somm’ fou, comme on se plaisait à l’appeler, avait effectivement ce légendaire esprit lutin, mutin et coquin typique des empêcheurs-de-déguster-en-rond.

Le plus troublant, en ce qui me concerne du moins, est ce que ces deux disparus, Émond et lui, étaient de grandes gueules, comme bibi. Aussi, quand ils sont apparus chacun dans le milieu du vin, je m’étais dit tiens, voilà la relève, il va y avoir des chialeux pour tenir le fort, avec moi et après moi.

Sauf qu’Émond et Pelletier, deux fortes têtes, ont été fauchés dans la fleur de l’âge…

Des fois, vraiment, elle est pas belle, la vie.

David Pelletier, sommelier, chroniqueur en vin et auteur du blogue Le sommelier fou     Photo : Radio-Canada/Michel Harvey

David Pelletier, sommelier, chroniqueur en vin et auteur du blogue Le sommelier fou Photo : Radio-Canada/Michel Harvey

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À boire, aubergiste !

Assez pour l’éloge funèbre et les violons, auraient maintenant dit les principaux intéressés eux-mêmes. Life must goes on. « On n’est plus là et puis basta ! »

Voici donc ce que j’ai retenu parmi les bonnes bouteilles goûtées dernièrement – et que du bon, hein, pas de contrefaçon.

Clemente Vii Chianti Classico Riserva 2011 – Un bon chianti classico riserva qui a commencé à se dépouiller, à la facture d’ensemble moderne, au fruité bien présent, et au caractère boisé bien intégré. [25,80 $]

Les Vins De Vienne Saint-Joseph 2014 – Un « saint-jo » délicat, comme le sont souvent les vins de cette appellation, la concentration est là, le fruit, le bois, mais tout ça a un côté relativement aérien, plutôt élégant. [31 $]

Castelli Del Grevepesa Clemente Vii Chianti Classico Riserva 2011 Les Vins De Vienne Saint Joseph 2014 Mullineux Kloof Street Red 2014 Coteau Rougemont Poire De Glace 2014 La Spinetta Nebbiolo 2013

Kloof Street Swartland Rouge 2014 – Assemblage à base de syrah (86 pour cent) indéniablement sud-africain, avec ses notes de fumée. Pour le reste, ce rouge de Swartland possède beaucoup de fruit, une belle fraîcheur, de la profondeur également. [22,05 $]

Coteau Rougemont Poiré De Glace 2014 – Très sucré mais excellent, avec assez d’acidité pour demeurer relativement rafraîchissant. Délicieux, très poire au nez, des notes d’épices, un soupçon de miel. Chapeau ! [21,45 $ les 200 ml]

La Spinetta Langhe Nebbiolo 2013 – Excellent rouge du Piémont, aux notes à la fois florales et viandées. En bouche, c’est corsé, profond et bourré de fraîcheur. Un remarquable rapport qualité-prix. [28,95 $]

Catena Mendoza Malbec 2014 – Violacé, vanillé, avec une masse de fruit rouge derrière, une touche réglissée en bouche, quelques notes herbacées, du corps, de la fraîcheur, une pointe saline en finale. [21,95 $]

Catena Malbec High Mountain Vines 2014 Domaine Ostertag Pinot Gris Barriques 2013 La Moussière Sancerre 2015 Jean Claude Boisset Nature d'Ursulines 2014 Pierre Henri Morel Signargues Côtes Du Rhône Villages 2014

Domaine Ostertag Pinot Gris Barriques 2013 – À la fois austère et gourmand, tendu et généreux. Pratiquement sec par ailleurs (3,4 g) et d’une superbe texture. [35,25 $]

La Moussière Sancerre Alphonse Mellot 2015 – Un sancerre sans buis ni pipi de chat, charnu, généreux, aux accents de fruit tropical bien qu’il soit par ailleurs plutôt sec. Excellent ! [31 $]

Jean-Claude Boisset Nature D’ursulines Pinot Noir 2014 – Un vin « nature » qui n’a pas les fréquents odorants et troublants attributs du genre… Typé pinot, avec élégance qui plus est, boisé subtil, corps moyen, aucune minceur. [29,80 $]

Signargues Pierre Henri Morel Côtes-Du-Rhône Villages 2014 – Savoureux assemblage de syrah (70 pour cent) et de grenache, pas trop riche, pas trop corsé ni trop capiteux, avec une bonne acidité et une jolie texture enrobée. [19,55 $]

Marc

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