Les bons choix de Marc – Août 2016
L’Alsace, pays du blanc
par Marc Chapleau
Le vin fait voyager, on le répète sur tous les tons depuis de nombreuses années. J’ai pris l’adage au pied de la lettre, le mois dernier. Mais la mise en contexte, pour commencer.
Je devais me rendre en Alsace en juin, entre autres pour aller à Millésime Alsace, une foire viticole qui se tient chaque année à Colmar. Un coup du sort m’a toutefois empêché d’y aller, j’ai finalement dû renoncer. Embêté d’avoir fait faux bond à mes interlocuteurs alsaciens, je me suis dit que j’allais m’y rendre quand même… en passant par la SAQ. Goûter les vins d’un pays, c’est ce qu’on dit, nous transporte d’emblée dans ces contrées.
Bon, c’est un peu exagéré. On ne retrouve en effet pas la lumière alsacienne, son architecture, ses collines et ses montagnes, sa tarte à l’oignon et sa choucroute, dans chaque bouteille qui vient de là-bas.
Mais… tout de même, on y accède indirectement, en pensée. C’est d’ailleurs l’impression que j’ai eue en goûtant le dernier millésime du Gentil d’Hugel, dont je parle plus bas, avec mes autres bons achats.
Il faut dire que cette cuvée rassemble les principaux cépages de la région : riesling, sylvaner, pinot blanc, pinot gris, gewurztraminer et muscat. Dans une seule et même bouteille, tout le fruit de l’Alsace.
LA QUESTION DU SUCRE
Ce Gentil contient du sucre – 4,4 g par litre, selon saq.com. La plupart des vins alsaciens, pour l’essentiel blancs, en contiennent d’ailleurs à divers degrés.
En langage de tous les jours, celui de la majorité des consommateurs, ces vins sont fruités — trop, au goût de certains.
Les gens n’ont pas tout à fait tort d’associer fruité et sucré ; un fruit, lorsqu’il est mûr, comme c’est le cas pour la plupart des raisins récoltés pour faire du vin, est nécessairement sucré.
Cela dit, ce n’est pas tant la quantité de sucre dans le vin qui importe, comme l’équilibre. Si par exemple l’acidité est élevée, le sucre passe comme une lettre à la poste, il ne fait pas broncher. Le vin demeure rafraîchissant, et éminemment recommandable. Surtout à table et, dans le cas des vins alsaciens, avec des mets d’inspiration asiatique, encore l’un des meilleurs accords possibles.
GOÛTER L’AIR DU PAYS
Bien sûr, aller goûter les vins sur place demeure l’expérience ultime, qui marque durablement.
Commence à ce propos aujourd’hui même et se poursuit jusqu’au 15 août, la Foire aux vins d’Alsace, à Colmar, le coeur de l’Alsace viticole.
Si vous êtes en France, sur le point de partir, ou du type à ce point impulsif que vous iriez volontiers comme ça, à la toute dernière minute, l’occasion serait belle de se familiariser avec la production d’une région encore relativement peu fréquentée, que tout le monde connaît mais que pas assez de gens encore côtoient sur une base régulière.
NOS OLYMPIQUES À NOUS !
Changement de sujet : les vrais Jeux s’ouvrent aujourd’hui, à Rio, mais nous, de Chacun son Vin, avons déjà tenu les nôtres, en juin.
Il s’agissait en fait d’une compétition nationale, où au-delà d’un millier de vins canadiens ont été évalués par notre comité d’experts réunissant des dégustateurs du Québec, du reste du Canada et de l’étranger.
N’hésitez pas : pour boire québécois ou canadien et pour boire bien, consultez notre site faisant état des résultats aux Concours des meilleurs vins du canada
~
À boire, aubergiste !
Gentil 2015 Hugel — d’abord on prononce, au choix, hu-jel ou hu-guel. Ensuite, on saura qu’il s’agit d’un blanc à la fois léger, fruité et nerveux, pas compliqué et précisément pour cette raison, plutôt passe-partout — à table comme à l’apéritif, c’est dire.
Fernand Engel Riesling Réserve 2013 — Assez finement typé riesling au nez, des airs d’Allemagne, même. La bouche suit, assez délicate, pas cristalline comme dans la Moselle, n’exagérons rien, mais une relative pureté de fruit, un caractère sec (3,5 g), une bonne acidité. Très bon, et à prix très ok !
Léon Beyer Gewurztraminer 2013 — Très bon gewurztraminer signé Beyer, ce qui ne surprend pas, la maison ayant une excellente réputation. Nez attrayant de rose légèrement fanée, de poivre aussi et du tonus en bouche, peut-être même un soupçon d’acidité volatile et de gaz carbonique, ça ne s’effondre pas, bien au contraire !
Pfaff Riesling Cuvée Jupiter 2013 — Peut-être moins sec que par le passé, mais toujours aussi satisfaisant, et presque aussi nerveux. Beau fruit bien typé, et avec les notes de sapinage souvent associées aux rieslings.
Pfaff Black Tie 2015 — Moitié pinot gris, moitié riesling, 11 g de sucre résiduel, superbe acidité, saveurs mi-corsées bien tendues, bien nerveuses. Avec le homard, sans hésiter.
Deiss Alsace 2014 — Un assemblage qui n’est pas sans rappeler celui du Gentil d’Hugel — sans sylvaner ni muscat, toutefois. Tout plein de fruit, un peu de sucre (5,5 g), mais un surcroît de profondeur, dans celui-ci. Prix plus élevé, aussi, autour de 26 $.
Et maintenant un rouge, pas de l’Alsace parce qu’en dépit de quelques réussites ici et là, le pinot noir, notamment, y est rarement mémorable.
Par contre, le Calera Pinot Noir Central Coast 2013 est à la fois riche, puissant et rafraîchissant — et l’apport boisé, quoique notable, est bien maîtrisé. La belle Californie !
Enfin, une fois n’est pas coutume, un champagne, l’excellent Fleury Fleur de l’Europe, à seulement 53 $. Je sais, l’addition est corsée, mais étant donné qu’on nous matraque au Québec depuis de nombreuses années avec des prix gonflés pour les champagnes, on se console comme on peut. Celui-ci, chose certaine, est vif tout en étant fin, presque aérien.
Marc
Note de la rédaction: vous pouvez lire les commentaires de dégustation complets en cliquant sur les noms de vins, les photos de bouteilles ou les liens mis en surbrillance. Les abonnés payants à Chacun son vin ont accès à toutes les critiques dès leur mise en ligne. Les utilisateurs inscrits doivent attendre 60 jours après leur parution pour les lire. L’adhésion a ses privilèges ; parmi ceux-ci, un accès direct à de grands vins!