Les bons achats de Marc – août

L’autre Australie
par Marc Chapleau

Marc Chapleau

Marc Chapleau

Nadia en parlait récemment ici même, sur Chacun son Vin. Les vins australiens sont mal représentés au Québec. Certes, il y en a près de 350 inscrits au répertoire du monopole, mais relativement peu sont vraiment intéressants et surtout distinctifs, c’est-à-dire à même de révéler le potentiel insoupçonné de ce pays.

Cela n’empêche pas l’Australie d’être – avec l’Afrique du Sud – le pays qui a enregistré la plus forte hausse des ventes à la SAQ la dernière année, avec un bond de 16,4 %. Cette performance est pour l’essentiel due aux quatre ou cinq grandes entreprises qui produisent là-bas environ 80 % du vin national.

Pas que ces mastodontes soient à dédaigner, bien au contraire. Mais, comme le disait un œnologue rencontré à Melbourne en 2012 : « Avant, il y avait plus de gars allumés et colorés dans notre industrie. Puis, un jour, les grosses sociétés ont débarqué et une bonne partie du fun s’est envolée… Mais là, ces dernières années, le plaisir revient, il y a de plus en plus de vignerons déterminés, pleins d’idées et surtout passionnés. »

C’est certain : quand on débarque chez les mégaproducteurs, pour la poésie du vin, il faut repasser. Leurs immenses installations ressemblent à des raffineries. On enfile même des gilets de sécurité pour avoir le droit de circuler parmi les citernes et les camions. La plupart des dirigeants de ces entreprises assument toutefois bien ce statut « industriel ».

Et j’ai bien aimé, personnellement, une bonne partie de ce que j’ai bu lors de mon passage chez ces supergrands, tant chez Peter Lehmann (8,5 millions de bouteilles) et chez Wolf Blass (48 millions) que chez Yalumba (environ 12 millions).

CHIC, UNE BIÈRE !

Je suis allé en Australie deux fois, jusqu’ici. À chaque reprise, ces constats : ils servent le vin rouge trop chaud (pour nos palais nord-américains) ; et la bière froide – la fameuse cleansing ale – est une bénédiction après une grosse dégustation de généreux rouges australiens.

Troisième réalité méconnue, il ne fait pas atrocement chaud partout, en ce pays. Certaines régions, notamment autour d’Adélaïde, sont même assez fraîches. Pensons aux Adelaide Hills, à Clare Valley (rieslings vifs et structurés), à Eden Valley (rieslings plus floraux, plus délicats), à la Tasmanie (pinot noir et mousseux).

Cela dit, même dans la Hunter Valley, au nord de Sydney, une des régions les plus chaudes, on trouve d’excellents vins. Et notamment des blancs, chose encore plus étonnante. Les sémillons de la maison Tyrrell’s, par exemple, peuvent par surcroît vieillir jusqu’à 20 ans, voire plus – comme en ont font foi les quelques verticales auxquelles j’ai eu l’occasion de participer.

On n’en trouve hélas que rarement au Québec. Il ne doit pourtant pas en manquer pour l’exportation, puisqu’en Australie même, environ 40 % de tout le vin blanc consommé sur place vient de… Nouvelle-Zélande — en l’occurrence, le fameux Sauvignon Blanc.

Paradoxe, quand tu nous tiens. 

Quoi qu’il en soit, elle semble révolue, l’époque où tout ce qui provenait de Down Under manquait de finesse et de subtilité. Tout n’est pas renversant, évidemment, et la signature australienne, son obsession pour le primary fruit, se reflète toujours dans une majorité de cuvées. Mais on sent aussi une volonté de lever le pied, justement, de toujours contrôler à fond la vinification, c’est certain, mais en étant davantage à l’écoute des terroirs et de ce que chaque région précise, chaque coteau, chaque vallée permettent d’aller chercher.

Et donc, pour un peu que l’offre se raffine dans les magasins de la SAQ, on va franchement s’amuser.

À boire, aubergiste !

Bien entendu, je ne vais pas vous laisser filer sans suggérer une couple de bonnes bouteilles, sinon remarquables du moins d’un bon rapport qualité-prix.

Lindemans Bin 65 Chardonnay 2014 : Très correct chardonnay australien, au boisé tempéré, aux saveurs pas trop sucrées (6 g de résiduel) et à l’acidité bien présente.

Wyndham Estate Bin 222 Chardonnay 2014 : Un boisé plus marqué que dans le Bin 65 de Lindemans, des notes de fumé, un ensemble qui demeure relativement nerveux.

Lindemans Bin 65 Chardonnay 2014 Wyndham Estate Bin 222 Chardonnay 2014 Yalumba The Y Series Viognier 2014

Yalumba The Y Series Viognier 2014 : Corsé, parfumé, épicé, impression de sucre résiduel assez marquée, pourtant il n’y en a que quelques grammes, selon saq.com. Probablement à cause du fruit bien mûr, abricoté.

Grosset Polish Hill Riesling 2012 : Un riesling à la fois riche et corsé, minéral également, avec des notes de pierre à fusil au nez. Les accents rappelant les conifères, typiques du riesling, ressortent en bouche. Beaucoup d’agrumes également, la lime notamment. Du coffre, du nerf et pratiquement pas de sucre.

Grosset Springvale Riesling 2012 : Moins minéral que son grand frère « Polish Hill » (moins cher, aussi), moins fumé et moins profond, mais très bon, tout en fruit et en nervosité, et un caractère bien typé riesling.

Grosset Polish Hill Riesling 2012 Grosset Springvale Riesling 2012 Josef Chromy Pepik Pinot Noir 2013 Tait The Ball Buster Red 2012

Josef Chromy Pepik Pinot Noir 2013 : Un très bon pinot noir de Tasmanie au nez fumé, qui évoque également la rhubarbe et la mûre. En bouche, l’ensemble est encore bien tendu, légèrement tannique.

Tait the Ball Buster Red 2012 : Costaud, baraqué même, mais voilà, l’acidité est là, le vin n’est pas lourd malgré ses 15,5 % d’alcool. À table cependant, on ne sifflera pas une bouteille en moins de deux ; à réserver pour les fromages durs de fin de repas.

 

Santé !

Marc

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