Les choix de Nadia – Cellier
Beaux, bons et pas toujours chers
de Nadia Fournier
Il y a quelques semaines, la presse spécialisée était conviée à déguster une trentaine de vins présentés dans le dernier numéro du magazine Cellier. En toute justice, je dois avouer que la qualité d’ensemble était particulièrement satisfaisante. Ce qui n’a pas toujours été le cas au cours des derniers mois.
Aussi, plutôt que de se limiter aux vins italiens de renom comme le laisse supposer la page couverture, le présent arrivage mise sur une sélection assez hétérogène. Du Médoc à McLaren Vale (Australie), en passant par le Roussillon et la vallée de l’Okanagan, on en trouvera pour tous les goûts.
Parmi les vins qui seront mis en marché demain, le 17 avril, peu de nouveautés, mais une poignée de valeurs sûres que l’on revisitera avec un plaisir sincère, comme cet excellent Bourgogne Côtes d’Auxerre Pinot noir 2012, l’Empreinte du Terroir (22,25 $), produit par la famille Goisot. Régal de suavité et de fraîcheur, ce vin étonne par son étoffe en bouche et regorge de saveurs fruitées très pures, évoquant la cerise acidulée. Élégant, digeste et tout à fait dans l’esprit du millésime 2012 en Bourgogne. Son originalité repose, entre autres, sur une petite proportion de césar, un cépage obscur que l’on retrouve presque exclusivement à Irancy, une appellation du nord de la Bourgogne. Mordus de pinot noir, faites-en provision !
Loin d’être en reste, les amateurs de vins de Bordeaux voudront mettre la main sur ce duo médocain d’une qualité irréprochable. Tellement bons qu’ils pourraient même reconquérir ceux d’entre vous qui ont tourné le dos à Bordeaux depuis la montée stratosphérique des prix au cours de la dernière décennie. Car en plus d’être abordables, ces deux vins s’inscrivent parfaitement dans l’idée que l’on se fait d’un bon « claret ». Cette expression britannique presque désuète aujourd’hui s’emploie traditionnellement pour désigner les vins rouges du Médoc que l’on buvait avec plaisir à table, tant ils étaient digestes.
Rien de flamboyant donc, dans ces deux crus bourgeois. Plutôt un profil très classique qui mérite d’être signalé dans le contexte du millésime 2009, qui a donné naissance à des vins particulièrement denses et concentrés.
Château Tour Haut-Caussan, Médoc 2009 (30,50 $)
Sur la commune de Blaignan, à une douzaine de kilomètres de St-Estèphe, ce cru bourgeois est la source d’un vin solide, charpenté et d’une mouture très médocaine. La matière est mûre, avec juste ce qu’il faut d’aspérités tanniques pour donner du tonus à l’ensemble. On peut déjà l’apprécier, mais il continuera de se bonifier jusqu’en 2020.
Château Les Ormes Sorbet, Médoc 2009 (35 $)
Jean Boivert a laissé en héritage une belle propriété d’une vingtaine d’hectares devenue l’un des meilleurs crus bourgeois du nord du Médoc. Le 2009 profite d’un usage intelligent de la barrique, qui met en valeur l’étoffe et la structure caractéristique du cabernet sauvignon, sans en dénaturer les arômes. Déjà savoureux, son équilibre lui permettra de tenir aisément jusqu’en 2020.
Pour en finir avec l’hiver
Envie de célébrer l’arrivée (très tardive) du printemps ? Pour conjurer le mauvais sort et tromper Mère nature, le vin rosé n’a pas d’égal. Surtout s’il est façonné dans les règles de l’art, comme celui des frères Parcé au Domaine de la Rectorie, Côté Mer rosé 2012 (25,80 $). Sur leur domaine de Collioure, à une vingtaine de kilomètres de l’Espagne, les frères Parcé élaborent ce vin tout à fait singulier issu de grenache, de carignan et de syrah. Stylistiquement à mi-chemin entre un rosé et un vin rouge léger, leur Côté Mer fait preuve d’une complexité nettement supérieure à la moyenne. Vineux, généreusement fruité et ponctué de notes salines qui le rendent encore plus digeste et lui confèrent un charme fou!
Pour accompagner l’agneau pascal, on retiendra aussi ce bon vin de Navarre issu d’un assemblage bordelais : Tandem Macula 2006, Navarra (22,55 $). Produit dans le nord du pays, à l’est de la Rioja, cet assemblage de cabernet sauvignon et de merlot séduit par son nez de fruit noir et de paprika. La bouche est mûre et le temps a permis aux tanins de se fondre, mais le vin ne manque pas de tonus et laisse en finale une agréable sensation de fraîcheur malgré ses 15 % d’alcool. À boire au cours des deux prochaines années.
Vins italiens de renom
Mis en marché dans l’arrivage du 3 avril dernier, les vins suivants étaient encore offerts en quantités significatives au moment d’écrire ces lignes.
Casanova di Neri Tenuta Nuova 2008, Brunello di Montalcino (70,50 $)
Même s’il n’a pas l’envergure du savoureux 2007 commenté l’an dernier, le Tenuta Nuova est à retenir parmi les références en matière de Brunello moderne. Rond, mûr et très suave, des odeurs de bitume et de fumée, sur un fond de fruits bien mûrs et d’épices. Sa trame tannique fondue le rend déjà agréable à boire; il le restera jusqu’en 2018.
Castello del Terriccio Tassinaia 2006, Toscana (29,95 $)
Replanté vers la fin des années 1980, le domaine de Gian Annibale Rossi di Medelana profite des conseils de l’œnologue Carlo Ferrini depuis ses débuts. Fidèle au style affectionné par Ferrini, ce vin composé de cabernet sauvignon, de merlot et de sangiovese est fondu par le temps, mais aussi étonnamment jeune. Savoureux, agrémenté d’un bon goût de fruits noirs, bien servi par l’élevage et d’une longueur appréciable.
Ornellaia 2011, Bolgheri Superiore (189,25 $)
Propriété exclusive de la famille Frescobaldi depuis 2005, Ornellaia reste fidèle au style suave et plantureux qui a fait son succès. Le 2011 fait preuve de beaucoup d’étoffe et s’appuie sur un assemblage bordelais, dominé par le cabernet sauvignon (51 %). Sphérique, accessible et enrobé par un usage calculé du chêne français, qui arrondit ses angles et l’agrémente de notes de vanille, mais fort bien tourné dans un style moderne. À boire sans se presser entre 2015 et 2020.
Bibi Graetz It’s a game! 2011, Toscana (34,25 $)
Interprétation généreuse et sphérique du cépage sangiovese par l’œnologue Bibi Graetz. Peu ou pas d’aspérités tanniques, une profusion de saveurs d’eau-de-vie de fruits et de réglisse noire et une finale chaleureuse. Pas très toscan dans le style, mais résolument méditerranéen.
C’est tout pour cette semaine, mais nous nous reverrons très bientôt !
Santé !
Nadia Fournier
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